vendredi 22 avril 2011

Citation

A haute voix j'ai dit : "Qui est vivant ? qui est mort ?" Personne ne m'a jeté un regard. Au contraire, les corps se sont tassés un peu plus, la tête rentrée dans les épaules. Qui est vivant ? Qui est mort ? Est-ce que c'est possible encore de savoir ça ? Une tête, un tronc, deux jambes et deux bras pour branler le tronc. De la cendre en divague qui agite les ombres : vous appelez ça des corps ? Il n'y a plus de corps. Il n'y a qu'un brouillard de tics. Une déferlante de gestes morts, qui bougent tous seuls, comme ces grenouilles crevées qu'on pique à l'acide : elles réagissent par réflexe. Le réflexe est plus fort que la mort. Alors ça déborde les trottoirs, tous ces tics montés sur pattes, cette forêt de saccades en vrac, de tressautements qui s'accablent. Toute cette hystérie navrée qui grouille et réclame en silence après sa peine.
Yannick Haenel, Cercle

mardi 5 avril 2011

Les filles des 343 salopes vont bien, merci


Plus de 200 000 femmes avortent chaque année en France.

Cet acte, pratiqué sous contrôle médical, est des plus simples. Pourtant, le parcours des femmes qui avortent, lui, l'est de moins en moins :

Le droit à l'IVG est menacé : en pratique, par la casse méthodique du service public hospitalier, et dans les discours, car l'avortement est régulièrement présenté comme un drame dont on ne se remet pas, un traumatisme systématique.

Ces discours sur l'avortement sont des slogans éloignés de ce que vivent la grande majorité des femmes, ils ont pour but de les effrayer et de les culpabiliser.

Nous en avons marre que l'on nous dicte ce que nous devons penser et ressentir.

Depuis le vote de la loi Veil en 1975, a-t-on cessé de prédire le pire aux femmes qui décident d'avorter ?

Nous en avons assez de cette forme de maltraitance politique, médiatique, médicale.

Avorter est notre droit, avorter est notre décision. Cette décision doit être respectée : nous ne sommes pas des idiotes ou des inconséquentes. Nous n'avons pas à nous sentir coupables, honteuses ou forcément malheureuses.

Nous revendiquons le droit d’avorter la tête haute, parce que défendre le droit à l’avortement ne doit pas se limiter à quémander des miettes de tolérance ou un allongement de la corde autour du piquet.

Nous disons haut et fort que l'avortement est notre liberté et non un drame.

Nous déclarons avoir avorté et n’avoir aucun regret : nous allons très bien.

Nous réclamons des moyens pour que le droit à l’IVG soit enfin respecté. Nous réclamons son accès inconditionnel et gratuit mais également la liberté de faire ce que nous voulons de notre corps sans que l'on nous dise comment nous devons nous sentir.