mardi 23 décembre 2008

C'est Noël, rions

Alors bien souvent nous sommes énervés et nous disons aux sujets de notre inimitié « toi tu vas te prendre mon pied dans ta gueule ». Et bien, c'est arrivé littéralement à ce bébé. Non pas qu'il fut l'ennemi héréditaire de qui que ce soit (même si on sait qu'à cet âge, certains sont très irritants) mais parce qu'il souffrait de ce que l'on nomme un foetus in foetu, soit un jumeau absorbé dans l'organisme de son jumeau aux premiers stades de développement embryonnaire. En plus d'une tumeur cérébrale, ce jeune enfant renfermait donc dans sa boîte crânienne un pied ainsi que le début d'un autre pied, d'une main et d'une cuisse. Oui, je plains la mère qui a dû faire passer tout cela comme d'autres essayent de faire passer un éléphant par une coccinelle.

jeudi 18 décembre 2008

Mite

Quand j'étais jeune (pour ne pas dire petite) un voisin avait décidé de transformer sa maison en chalet canadien, il avait acheté le bois, fait les travaux, tapé, cloué... Au bout de quelques mois, la transformation terminée, certains voisins toujours bien intentionnés (c'est la définition du terme) avaient jugé que la maison jurait. Qu'un chalet canadien, là, dans un lotissement upper-class de crypto-banlieue, ça faisait tâche, ça n'allait pas, non, impossible. Le voisin amoureux des caribous fut donc forcé de tout démonter et de remettre sa maison en « l'état ». Ce qu'il fit, avant de vendre sa propriété et d'aller voir plus loin si on voulait bien accepter sa xylophilie.

Je n'ai jamais saisi cette histoire, pourquoi quelqu'un ne pouvait pas faire ce qu'il voulait de sa propriété. Pourquoi les nains de jardins, les mouettes en plâtre les hortensias oui, et pourquoi les lattes de bois sur murs extérieurs, non. Pourquoi cette putain d'harmonisation obligatoire, à tes frais en plus, aller et retour, et pourquoi la politesse de ne pas partir de nuit en plastiquant le tout...

En même temps, à y réfléchir, il y a pire qu'un beauf contraint d'abandonner ses lubies d'architecture boréale, il y a ça : Thierry Ehrmann, auteur de la Demeure du Chaos, et le Collectif des Artistes prennent acte que l’Arrêt de la Cour d’Appel de Grenoble les condamne à la remise en état demandée par le Ministère public ainsi que la Mairie Réac de Saint Romain au Mont d’Or, qui s’acharne dans son “négationnisme artistique” depuis 9 années.

Je suis évidemment passablement énervée par ce genre de jugement, pour ne pas dire plus (aglagla, a peur). J'espère que le pourvoi en Cassation portera ses fruits, c'est tout.

Il y a peu, je parlais avec une amie du fait que l'état actuel de la France pourrait très bien faire l'objet d'un roman dystopique. Sauf que ce n'est pas de la fiction, c'est réel. Ça arrive maintenant, c'est vrai : en France, on emprisonne des gens sous prétexte qu'ils ont une attitude bizarre, en France, le président de la République en appelle à la chialerie publique si un vice de forme juridique lui déplaît, en France, on démolit des œuvres d'art parce qu'elles jurent dans le paysage... jusqu'où va-t-on descendre disait l'autre ?

Et pendant ce temps là, rassurez-vous, les marrons glacés s'empaquètent.



mercredi 10 décembre 2008

Paramètres

Dans la série le monde du travail est un milieu de babouins, une récente étude vient de révéler que les femmes perçues en entretiens d'embauche comme tout aussi confiantes et ambitieuses que les hommes, sont aussi considérées comme manquant de capacités sociales. Inversement, les femmes jugées coopératives et modestes, sont celles que l'on trouve le moins compétentes. Et dans les deux cas, elles se font moins embaucher que les hommes : on verra la non-socialité comme rédhibitoire chez une femme compétente, et pareil, chez une femme gentille et docile, on soulignera son manque de compétences pour ne pas l'embaucher. Moralité, pas étonnant que l'utérus à pattes soit encore le métier préféré de mes congénères.

lundi 8 décembre 2008

Adaptation



Lorsqu'ils sont venus chercher les pédo-pornographes
Je me suis tue, je n'étais pas pédo-pornographe.

Lorsqu'ils sont venus chercher les néo-nazis
Je me suis tue, je n'étais pas néo-nazie.

Lorsqu'ils sont venus chercher les zoophiles
Je me suis tue, je n'étais pas zoophile.

Lorsqu'ils sont venus chercher les incitateurs au suicide
Je me suis tue, je n'étais pas incitatrice au suicide.

Etc.

Delay

Le brouillon d'un rapport concernant le traitement hormonal des enfants et adolescents se sentant transsexuels vient de paraître. 65 pages dans lesquelles, entre autres, il est conseillé d'utiliser des traitements visant à retarder la puberté pour permettre à ces individus de mûrir leurs choix avant, éventuellement, d'envisager une réassignation de genre. New Scientist revient sur ce rapport et pose le débat de manière, comme toujours, très pertinente.



mardi 2 décembre 2008

Citation

« La liberté sexuelle ne consiste pas dans l’élaboration et la diffusion d’un ‘bon’ standard de désir, mais au contraire dans la suppression de tout standard. Il ne s'agit pas d'un devoir d'émancipation personnelle (‘libérez, épanouissez votre sexe !...’) mais d'un ensemble de libertés publiques. On entretient — délibérément ? — une confusion entre les deux notions, et on nous arrose de recettes individuelles de bonheur sexuel là où le problème est d'institutions, de droit et de culture. On veut nous dicter de nouvelles normalisations là où la liberté implique l'abolition de toutes normes.

Falsification. Et dérision. À l'échelle individuelle, il est entièrement indifférent que tel homme ait l'érotisme le plus endormi, 1'autre le plus saugrenu, tel autre le plus vaste ; qu'on ait dix mille amants des deux sexes et de tous les âges, ou qu'on en ait un seul ; qu’on vive pour faire l'amour, ou qu'on meure vierge ; que le corps humain vous éblouisse, ou qu'il vous ratatine de dégoût et de haine.

Car, si aucune instance collective ne reprend à son compte l'un de ces comportements pour l'universaliser, aucun n'est mauvais, aucun n'est nuisible. Si chaque choix a pour source non un endoctrinement, une oppression, mais les événements et les caprices de votre histoire personnelle, les constantes et les tropismes de votre corps, chacun de ces choix est à respecter et à tenir pour viable.

La liberté en amour n'est donc acquise qu'au moment ou aucune forme de sexualité n'a le pouvoir de régner sur les autres et de les modeler à son image : et je parle ici du règne par l'Etat, et non des séductions auxquelles on a plaisir à succomber.

Le but de la libération sexuelle n'est pas que tout le monde fasse ou puisse faire l'amour avec tout le monde : mais que l’Etat, ses structures, ses lois s'interdisent tout regard sur les vies privées, quelque âge, quelque sexe, quelques goûts que l'on ait. Les sexualités ne sont pas du ressort de la morale publique : voila le seul principe qu'il s'agit d'instaurer. Nous sommes, je le sais bien, à des années-lumière de cette liberté-là ; je doute si nous la connaîtrons jamais.

Par ailleurs, les relations sexuelles n'ont besoin d'aucune morale spécifique. Les principes qui régissent nos autres interactions, notre coexistence, et qui définissent les limites des libertés de chacun, suffisent absolument à gouverner les actes amoureux.

Ni violence, ni contrainte, ni domination, ni propriété sur autrui : voila les seuls devoirs auxquels nos actes sexuels, comme tous les autres, ont à se plier ».

Tony Duvert, L'enfant au masculin, Minuit

lundi 1 décembre 2008

Morve

Le problème quand on est aussi intelligente et en avance sur son temps que moi, c'est que ce genre d'étude vous font le même effet que quelqu'un découvrant l'Amérique en 2008 (ou du fait que le mélange d'eau chaude et froide produit de l'eau tiède, qu'un fil peut couper du beurre, etc.). Oui, mesdames et messieurs ! Nos comportements et nos jugements moraux ne sont en fait pas si rationnels que cela, et il suffit de distiller de la « pureté » dans l'esprit d'une quarantaine d'étudiants pour qu'ils prennent des décisions moins sévères !


Dans deux expériences, des étudiants ont ainsi été invités à juger des situations morales selon le protocole suivant :


Situations morales à juger (ces situations ont été tirées de ce classique), sur une échelle de 1 à 9 (tout à fait Ok > extrêmement mal)

> actionner un levier permet de dévier un train fou qui, au choix, va tuer 1 ou 5 personnes

> manger un chien mort

> garder l'argent trouvé dans un portefeuille

> mentir sur son CV

> s'exciter sexuellement à la vue d'un chaton

> devenir cannibale pour ne pas mourir de faim après un crash d'avion


1ère expérience : Avant de juger, les étudiants doivent jouer à un jeu de mots, où le fait de souligner 3 mots dans une série fait découvrir une phrase. Dans la première partie de l'expérience, les phrases sont neutres. Dans la seconde, elles tournent toutes autour du champ lexical de la pureté et de la propreté.

2ème expérience : Avant de juger, les étudiants doivent regarder un film « dégoûtant » (un extrait de Trainspotting). Dans un cas on leur demande de se laver les mains, dans un cas, non.

Les deux expériences ont montré que les étudiants étaient moins sévères une fois leur mains lavées ou après le jeu de mots lexicalement « pur ».

Personnellement au niveau de moi, avec des mains relativement propres et sans avoir réellement lu de textes purs, aucune de ses situations ne me paraît absolument horrible. Sauf celle du chaton, si elle demande des attouchements non consentis par la bête, et celle du chien mort, si la viande est avariée. (Puis le portefeuille aussi, si c'est le mien, bien sûr)

Bonsoir.